back

Changements climatiques / L’agroforesterie, un moyen efficace pour une sécurité alimentaire [03-04/2013]

La lutte contre les changements climatiques en Afrique ne va pas sans la prise en compte des différentes méthodes culturales liées à l’agriculture. Dans la majeure partie des pays du continent, l’agriculture constitue le premier employeur de la population et le premier produit d’exportation. Protéger l’Afrique doit alors passer par l’adoption de techniques agricoles, permettant de protéger le sol et les cultures pratiquées.

L’agroforesterie constitue une chance pour les agriculteurs africains pour lutter contre les changements climatiques. Technique culturale qui associe les cultures à l’arbre, l’agroforesterie est une chance pour l’Afrique. Selon l’Organisation mondiale pour l’Agriculture et l’Alimentation (FAO), des millions de personnes pourraient échapper à la pauvreté, à la faim et à la dégradation de l'environnement si l'accent était mis davantage par les États sur l'agroforesterie, un mode d'occupation des sols associant arbres et production agricole. Pour Didier Snoeck, agronome au Cirad : «Un système agroforestier efficace se situe quelque part entre la monoculture, qui a un très lourd impact sur l'environnement, et l'agroforêt qui permet rarement à l'agriculteur de vivre correctement». Si la production des systèmes agroforestiers est généralement moindre que celle des monocultures, ce mode d'exploitation offre de nombreux bénéfices pour les paysans comme pour l'environnement. Parmi ces avantages, l’on peut citer une diminution de la quantité de travail et d’intrants, une diversification des ressources (vivrières, cultures de rente, bois, médicaments...), des systèmes moins vulnérables aux aléas climatiques et économiques, de nombreux services environnementaux tels que la préservation de la fertilité des sols et des ressources en eau, la prévention de l'érosion, le stockage du carbone et la conservation de la biodiversité. Sur le continent, de nombreux pays ont expérimenté et expérimentent plusieurs types de systèmes agroforestiers. Trois types de systèmes agroforestiers découlant de contextes différents sont étudiés au Cameroun, au Kenya et à Madagascar. La différenciation de ces systèmes découle du fait que les partenaires des trois pays possèdent des visions et des approches qui leur sont propres.

Mettre l’accent sur le reboisement

Joindre l’agriculture à la plantation des arbres est un moyen efficace de lutte contre les changements climatiques. Un agriculteur africain soucieux de préserver son écosystème et son sol est obligé de prendre en compte la dimension reboisement lorsqu’il pratique des cultures sur des grandes superficies. Cela a pour avantage évident la préservation aussi bien de l’environnement que des moyens de subsistance. En Afrique subsaharienne, le programme de la réduction des émissions provoquées par la déforestation et la dégradation des forêts (REDD) fait son petit bonhomme de chemin. Ce programme, s’il est piloté à bon escient, permettra de changer des comportements et pratiques néfastes à la bonne marche de l’agriculture tels que l’émission de carbone. A cet effet, le magazine Financial Times considère le marché du carbone comme un marché de produits de base au taux de croissance le plus rapide de la planète – avec l'agriculture, la foresterie et d'autres utilisations du sol qui jouent un rôle de plus en plus important. L'idée qui sous-tend le programme REDD est simple – payer les pays pour qu'ils réduisent les émissions du carbone provoquées par la déforestation et la dégradation des terres. On le sait, la recherche de la sécurité alimentaire par les pays en développement par le biais de l'expansion de l'agriculture conduit souvent à la déforestation et à la dégradation des forêts. Le principal défi pour la majorité des États subsahariens est de parvenir à concevoir des environnements agricoles qui permettraient de résoudre le conflit entre la préservation de cet environnement et les moyens de subsistance, et parvenir à conserver les profits issus des écosystèmes forestiers tels que le stockage de l'eau, la lutte contre l'érosion, la conservation de la biodiversité et la réhabilitation des sols. Pour ce faire, il suffirait d'associer les thèmes suivants : climat et moyens de subsistance, adaptation et atténuation, REDD et agriculture. L'agroforesterie devrait constituer une composante essentielle de cette approche. L'intégration de la culture arboricole à grande échelle dans les paysages agricoles créerait un puits de carbone efficace tout en assurant une production alimentaire durable, et contribuerait également, par d'autres manières, à l'adaptation aux changements climatiques. L’Afrique doit s’adapter à ses réalités si elle veut lutter efficacement pour prévenir des catastrophes liées aux changements climatiques.

Faire mieux avec peu

Les systèmes qui s'appuient sur la culture arboricole sont plus efficaces dans l'accumulation du carbone terrestre et sousterrain que l'agriculture traditionnelle. A titre d’exemple, un projet «investissement vert» réalisé en Inde a montré comment on pouvait exploiter une plantation d'arbres pour la compensation en fixation de carbone. Les experts en arboriculture et en carbone du Centre international d'agroforesterie affirment qu'un milliard d'hectares de terres arables (la majeure partie se trouvant dans des pays en développement) pourraient être transformés en paysages agricoles riches en carbone, contenant potentiellement 50 milliards de tonnes de dioxyde de carbone – soit le tiers du défi que constitue la réduction du carbone. L’Afrique dispose d’un atout pour pratiquer ce genre d’agriculture liée à la plantation des arbres. Son plus grand atout est la richesse de ses sols qui, du Nord au Sud, d’Est en Ouest, sont riches en éléments minéraux capables, grâce aux recherches scientifiques et technologiques, d’apporter un plus dans l’assiette des paysans. C’est un flux d’avantages dont les africains pourront bénéficier à travers le REDD. Pour que le REDD, ou tout autre effort d'atténuation des changements climatiques, atteigne ses objectifs, il faut pouvoir déterminer les priorités des moyens d'existence en milieu rural et se concentrer sur la garantie d'un «flux d'avantages». L'introduction de la culture arboricole dans l'agroforesterie offre ce flux par l'intermédiaire de ses produits tels que les fruits, les médicaments et le bois et grâce aux bienfaits des écosystèmes comme la pollinisation, le stockage de l'eau et la lutte contre l'érosion. La création d'opportunités pour les produits forestiers non ligneux est un instrument efficace pour réduire les risques et diversifier les options pour l'agroforesterie. Mais cela exigera la mise en place d'arbres, de marchés, de politiques et d'institutions qui conviennent aussi bien en Afrique que dans le monde.

Source : http://www.lenouvelafrique.net/pg.php?id_news=919