back

Menace acridienne - La nécessité d’une lutte transfrontalière [01/2013]

La menace acridienne tant redoutée chaque année en Afrique n’a pas eu lieu durant l’année écoulée. L’Afrique de l’Ouest, zone potentiellement sous la menace, a été épargnée. De Dori à Arbinda au Nord du Burkina Faso, en passant par Djibo, Gorom-Gorom, Sebba, les équipes de surveillance ont été en alerte même si les moyens techniques et financiers ont fait un peu défaut.

Avec la capture de quelques criquets pèlerins «solitaires» en juillet dernier dans la zone d’Arbinda au Nord du Burkina Faso, la menace acridienne s’est révélée réelle sur le territoire burkinabè. Les zones à risque potentiel sont connues. Il s’agit de Dori, Arbinda, Gorom-Gorom, Djibo, et Sebba, toutes des villes du Nord du «pays des hommes intègres». Dans ces zones, des postes de surveillance ont été érigés. La plupart des postes de surveillance sont composés d’au moins un chef d’équipe et d’un prospecteur. Certains postes, plus fournis, sont complétés par des manœuvres et un chauffeur. De passage dans les localités de Dori et d’Arbinda, situées à plus de deux cents km de la capitale, Ouagadougou, la réalité de la lutte antiacridienne se laisse découvrir. La menace, selon le Directeur régional de l’agriculture et de l’hydraulique du Sahel (DRAH), Michel Thiombiano, «est pour le moment inexistante mais redoutée». Il explique cette analyse par le fait que des signes avant-coureurs militent en ce sens. Notamment, le fait que le Mali et le Niger, pays frontaliers du Burkina Faso, sont de potentiels foyers d’attaque acridienne. Dans ce cas de figure, des dispositions ont été prises pour faire face à d’éventuelles attaques acridiennes. Au niveau de la Direction régionale de l’agriculture et de l’hydraulique du Sahel, des activités sont menées pour prévenir d’éventuelles attaques. Il s’agit de la communication aux différents directeurs provinciaux, des informations relatives aux attaques acridiennes dans les Nords malien et nigérien. En outre, des discussions sont menées sur les menaces qui pèsent sur le Burkina Faso en sa région sahélienne limitrophe au Mali et au Niger, lors des réunions du Conseil de direction. Mieux, quelques criquets pèlerins, capturés au début juillet de l’année 2012, ont été envoyés à la Direction de protection des végétaux et les prospections ont démarré depuis le mois de juillet de la même année. Ces prospections sont menées par des agents commis à la tâche.

Des équipes en alerte

Les équipes de prospections semblent être en alerte. Cinq équipes phytosanitaires couvrent les zones de Djibo, Arbinda, Dori, Gorom-Gorom et Sebba. Les chefs d’équipes sont secondés par des prospecteurs qui sont chargés de gérer les manœuvres sur le terrain. Gilbert Y. Konvolbo et Amidou Sawadogo sont respectivement chefs d’équipe phytosanitaire de Dori et d’Arbinda. Selon Gilbert Konvolbo, le chef d’équipe est chargé de la coordination de la prospection des équipes sur le terrain, de dresser les rapports journaliers, mensuels et les bilans phytosanitaire et de la lutte. A cela s’ajoute, selon Amidou Sawadogo, chef d’équipe d’Arbinda, la vérification des informations collectées par les prospecteurs. Quant au prospecteur, «il est au début et à la fin du processus de prospection», selon M. Konvolbo. Sièta Nikièma et Saïbou Iba sont respectivement prospecteurs de la zone de Dori et d’Arbinda. Selon M. Iba, «la prospection consiste à déterminer pour les équipes, l’itinéraire à suivre au cours d’une sortie de terrain, à déterminer le type de prospection (extensive ou intensive), à évaluer les densités, les espèces de criquets capturés, les supports prospectés, la prise des coordonnées et la nature des dégâts s’ils existent». Pour ce faire, les équipes ont besoin de ressources humaines et matérielles adéquates, ce qui n’est pas toujours le cas dans certaines situations.

Quelques difficultés subsistent

Dans leur volonté de mener à bien la prospection et la lutte contre les criquets pèlerins, les équipes phytosanitaires sont confrontées à des difficultés diverses. Il s’agit, entre autres, du manque de prise en charge financière pour les chauffeurs et les manœuvres depuis la fin du projet PULCPA en 2011. Le manque aussi de moyens financiers pour mener les activités (carburant, non fonctionnalité des dispositifs de communication radio). Les agents de terrain pointent aussi le doigt sur le manque de formation et de recyclage des équipes aux techniques de lutte antiacridienne et du personnel d’appui sur la maintenance et l’utilisation des appareils de traitement. Selon Ibrahima Ouédraogo, Directeur provincial de l’agriculture et de l’Hydraulique du Séno, «le manque de moyens en nombre et en qualité et les difficultés en matière de communication rendent difficile la remontée de l’information». D’autres difficultés, et non des moindres, plombent actuellement le dispositif de surveillance et de lutte antiacridienne. Il s’agit de la non opérationnalisation du VSAT (installation de communication par satellite), le retard dans la mise en place des frais de fonctionnement des équipes, l’insuffisance de produits de traitement et de matériels de protection, l’absence de boîte à pharmacie. A cela s’ajoutent le manque de visites médicales périodiques et spécifiques pour les manipulateurs des pesticides, le nombre élevé d’appareils de traitement en mauvais état, l’inaccessibilité de certains villages en saison hivernale. A titre d’exemple, en ce qui concerne les quantités de pesticide disponibles, la région de Dori ne dispose actuellement que de 1221 l de pesticide pour faire face à une invasion acridienne. Et, ce stock est le reliquat de la campagne écoulée. La zone d’Arbinda ne dispose que de 70 l. Or, les techniciens sont d’avis que la menace est réelle. D’où des mesures à prendre afin de ne pas être surpris par une invasion acridienne.

Quelques mesures probables

La lutte contre les criquets pèlerins doit être une priorité pour le Burkina Faso et pour la sous-région Ouest africaine. Il est capital et vital d’organiser une lutte transfrontalière contre le phénomène des criquets pèlerins. Dans ce sens, il est toujours mieux de prévenir que de guérir. Ainsi, il est urgent de remettre en état, de façon urgente, les moyens matériels de lutte contre le fléau. Que ce soient les responsables régionaux, provinciaux, les chefs d’équipes et les prospecteurs, tous sont unanimes pour dire qu’il faut redynamiser les cellules de base, renforcer les capacités opérationnelles des agents de terrain, former les agents en techniques appropriées de surveillance et de prospection, impliquer les différents ministères dans le processus d’identification et de lutte. Car, même si le fléau n’est pas encore actif, la menace, elle, est réelle. Le Burkina Faso peut faire face efficacement en cas d’invasion. Mais, il est clair que qui veut aller loin se lève de bonne heure.

Source : http://www.lenouvelafrique.net/pg.php?id_news=871