Article publié le 2015-03-18 par Par Mouhamadou Moustapha Thiam Société
Lancement de l’Année européenne pour le développement à Bruxelles : La culture, comme enjeu pour la Coopération au Développement [02/2015]
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Dans le cadre de la journée de lancement belge de l’Année Européenne pour le Développement 2015, un débat a réuni le 17 janvier dernier des professionnels de la culture et des représentants des pouvoirs publics belge et africain autour des grandes questions de l’heure. Il s’agissait de définir le rôle de la culture au sein de la coopération au développement. Quels sont les bénéfices que les pays du Sud comme du Nord peuvent en retirer tant au plan économique, social, éducatif qu’environnemental ou bien quel rôle pour les créateurs et les artistes dans les sociétés du Sud : agents de changement ou gardiens du temple ? Tels ont les axes majeurs de ce riche panel présidé par la Reine Mathilde en présence de Mr Alexander De Croo, Ministre de la Coopération au Développement, de Mme N'Diaye Ramatoulaye Diallo, Ministre de la culture du Mali, de Mr Mario Lucio Matias de Sousa Mendes Ministre de la culture du Cap Vert.

Reine Mathilde :

« Je me réjouis d’être présente à ce débat sur « La Culture, enjeu de la Coopération au Développement » rassemblant des personnalités et d’éminents spécialistes de la diversité culturelle et de l’engagement pour les Arts et la Culture dans les pays du Sud. Je félicite Africalia et la coopération belge au développement qui ont fait preuve d’originalité et d’audace en choisissant ce thème à l’occasion du lancement de l’Année Européenne pour le Développement 2015. La culture et le développement sont des dimensions multiformes qui, dans l’évolution de nos sociétés et des paysages culturels, s’avèrent indissociables. L’histoire nous montre que la culture a toujours joué un rôle prépondérant dans le processus de développement. Si, de nos jours, ce lien entre culture et développement ne fait plus aucun doute, ce sont sa nature et sa concrétisation – souvent difficilement quantifiable - qui font l’objet d’un débat. L’extraordinaire diversité artistique et culturelle ainsi que la richesse du patrimoine de l’Afrique –au même titre que d’autres continents- renforcent le développement durable. Le paysage institutionnel et la société civile agissent de façon complémentaire dans divers domaines: l’éducation et la formation de jeunes en quête de nouveaux repères, leur réinsertion au sein de la famille et de la communauté; l’enseignement et l’emploi; ou encore l’accès à un statut professionnel pour les artistes amateurs; les plates-formes de discussion vues comme des lieux d’échanges, d’apprentissage artistique et de pratique de la liberté d’expression et du dialogue démocratique. Je voudrais mentionner à titre d’exemple une expérience personnelle que j’ai vécue lors d’une visite officielle au Mali. J’ai notamment traversé le plateau des Dogons, où j’ai d’ailleurs eu la chance de rencontrer les habitants et le Dogon en personne. J’ai été non seulement impressionnée par le paysage splendide, mais surtout fortement interpellée par le capital culturel et social présent dans les villages, par l’étonnante mosaïque de peuples qui, tout en respectant des traditions et des valeurs séculaires, cherchent des synergies afin d’améliorer eux-mêmes leur qualité de vie. La musique et la danse y étaient omniprésentes. La culture ancestrale donne une fierté et une sécurité qui ne peuvent qu’encourager le souhait de développement personnel ».

Alexander De Croo, Ministre de la Coopération au Développement :

Bienvenue au lancement du volet belge de l’Année européenne pour le développement. Après l’inauguration officielle à Riga la semaine dernière sous le slogan “Notre monde, notre dignité, notre avenir”, c’est à présent à nous de donner ici à Bruxelles le coup d’envoi de l’Année européenne pour le développement. Je tiens tout d’abord à souhaiter la bienvenue à Sa Majesté la reine Mathilde. Majesté, je sais que vous vous intéressez et que vous vous engagez personnellement beaucoup dans le domaine de la coopération au développement. Votre présence en atteste une fois encore et souligne l’importance de cette année européenne pour le développement. Je tiens également à accueillir chaleureusement les ministres de la Culture du Mali, du Cap Vert et du Burkina Faso. Soyez les bienvenus ici à Bruxelles.

2015 est une année cruciale pour le programme de développement mondial, une année charnière. En septembre prochain, 193 pays mettront au point, à New York lors du sommet spécial des Nations Unies sur le développement durable, un nouveau programme de développement décliné sur de nouveaux objectifs en matière de développement durable. Dans son rapport de synthèse intitulé « La dignité pour tous d’ici 2030 », le secrétaire général des Nations Unies Ban Ki-Moon évoque la nécessité d’un énorme déplacement de paradigme. C’est en effet inévitable. Le monde est totalement différent d’il y a 15 à 20 ans. Les sept milliards de personnes qui peuplent la Terre n’ont encore jamais été aussi liées entre elles qu’aujourd’hui. Les populations et les pays n’ont jamais été aussi proches, reliés par notre économie mondialisée et par les possibilités immenses offertes par la science et la technologie. 2015 est aussi une année clé pour l’Union européenne et ses États membres, qui représentent le plus grand bailleur de fonds d’aide au développement dans le monde. En tant qu’acteur mondial du développement, nous aussi devons donner forme à ce glissement de paradigme, tout en veillant à la légitimité démocratique, car toute politique – y compris de développement - qui n’est pas suffisamment soutenue, est vouée à l’échec. À cet égard, il est encourageant de voir que plus de huit Européens sur dix considèrent l’aide au développement comme quelque chose d’important, selon l’Euro-baromètre.

Je me réjouis tout particulièrement que les jeunes aient en général un regard plus positif à ce sujet. Mais nous devons aussi oser reconnaître qu’à l’heure actuelle, un Européen sur deux n’a aucune idée de la manière dont est affectée l’aide au développement européenne. Dès lors, l’Année européenne pour le développement est une occasion unique de mieux informer la population, de lancer des débats et de nourrir un dialogue, et par là même, de renforcer l’assise (sociétale) de la coopération au développement.
Avec Africalia