Article publié le 2013-05-12 par Par Alexandre Korbéogo Dossier
Dossier import-export / Produits manufacturés africains - A la conquête de nouveaux marchés [04-05/2013]
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Les produits manufacturés africains ont la cote sur le marché international. Selon les données disponibles, l’Afrique se positionne comme une plaque tournante de produits manufacturés de qualité. De nombreux pays importent de l’Afrique des produits qui font la fierté des industries et participent à la valorisation de l’industrie mondiale.

Le pétrole africain est l’un des plus prisés sur le marché international. Ce produit, tout comme les autres produits manufacturés, occupe le marché international avec aisance. Que ce soit à Tokyo, New York où Pékin en Chine, les produits venus d’Afrique se font une place au soleil. Si l’Afrique, par ses besoins évidents dans tous les domaines notamment du fait de la force croissance de sa population, va devenir une destination d’exportation pour les entreprises du monde occidental et plus encore aujourd’hui pour celles des pays émergents (Chine, Inde, Brésil en tête), elle peut aussi offrir des perspectives intéressantes en matière d’importation. Aujourd’hui, les cinq parties de l’Afrique se battent au quotidien pour se positionner comme des pôles de croissance sur le marché mondial. Que ce soit l’Afrique occidentale, australe, ou orientale, de nombreuses opportunités sont offertes pour vendre et faire vendre les produits manufacturés tant sur le continent qu’en dehors. Dans cette concurrence, certaines parties se détachent des autres par la clairvoyance de leur politique commerciale sur le marché. L’Afrique anglophone est globalement plus prospère que l’Afrique francophone. Toutefois, si l’Afrique de l’Est est la région la moins riche du continent (PIB/hab = 315 USD en 2009) c’est elle, en revanche, qui a le mieux résisté à la crise mondiale. Avec une croissance moyenne supérieure à 6 %, elle devrait à nouveau se distinguer en 2010/11. En revanche, l’Afrique australe, sensiblement plus favorisée (PIB/hab = 4491 USD en 2009) a été plus sévèrement touchée en 2009. Elle se relèvera plus lentement que le reste du continent mais avec une croissance moyenne pour 2010/11 frôlant les 4 %. L’ensemble de la zone présente un environnement pour les affaires notablement plus favorable qu’ailleurs en Afrique subsaharienne ainsi que l’atteste le baromètre 2010 du Conseil Français des Investisseurs en Afrique (CIAN), environnement que vient encore renforcer une intégration régionale particulièrement dynamique, comme devrait en témoigner la mise en place, intervenue en juillet 2010, de la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE) dont les partenaires (Kenya, Tanzanie, Ouganda, Rwanda, Burundi) attendent un renforcement de la croissance qui devrait tirer l’ensemble de la zone. Cette croissance, si elle est mieux gérée, devrait permettre de tirer vers le haut les autres pays africains en vue de mettre l’accent sur le commerce entre les pays les moins développés.

Promouvoir les échanges Sud-Sud

Une part croissante des exportations de produits manufacturés africains est à destination des pays en développement. Les partenaires émergents autres que la Chine importent davantage de produits diversifiés en provenance du continent que les partenaires traditionnels, et ce, de manière croissante. En revanche, la part des biens manufacturés africains exportés vers les 25 membres originels de l’UE, les États-Unis et la Chine a décru. On constate une certaine progression des exportations de produits manufacturés africains vers un nombre limité de pays, même si cette tendance se manifeste sur l’ensemble du continent. Les pays africains doivent attirer une vaste gamme de partenaires émergents et engager des relations avec d’autres pays du Sud. En engageant des relations commerciales entre les pays du Sud, l’Afrique a de fortes chances de voir ses produits s’écouler aisément. Dans la mesure où les produits manufacturés d’Afrique allient la qualité à l’expertise, leur promotion et leur pénétration sur le marché mondial ne souffrent d’aucune ambiguïté. Des pays tels que l’Afrique du Sud, la Tunisie, le Maroc, l’Égypte, Maurice et l’Algérie se sont positionnés comme les meilleurs exportateurs du continent. Au Maroc, par exemple, de nombreuses petites et moyennes entreprises proposent des produits qui font la fierté des industries de fabrication basées dans les pays industriels tels que la Chine, les pays d’Asie, les États-Unis, etc. De nombreuses opportunités existent donc pour faire du continent le marché du monde. Pour saisir ces opportunités, il est nécessaire de surmonter certains obstacles et d’effectuer certains ajustements. Les différentiels de productivité entre pays africains et puissances émergentes peuvent retarder la diversification des biens commercialisables. Alors que les consommateurs africains bénéficient d’importations bon marché de biens de consommation et de vêtements en provenance des pays émergents, l’intégration des économies africaines aux chaînes de valeur mondiales pourrait contribuer, craignent certains auteurs, à ce que les entreprises africaines restent confinées aux échelons les plus bas des processus de fabrication. Pourtant, il n’en est rien. Le produit le plus sophistiqué que l’Afrique du Sud exporte en Chine en quantités importantes est l’acier. Malgré cette embellie, la Chine constitue une menace pour l’Afrique en ce qui concerne l’exportation des fibres textiles.

La menace chinoise

Avec l’AGOA, certains pays ont tenté de profiter des avantages de cet accord pour mettre en place ou faire renaître une industrie textile à forte main-d’œuvre tournée vers l’export. Cette stratégie a permis à Maurice, à Madagascar, au Kenya, au Lesotho et au Swaziland d’augmenter régulièrement leurs exportations textiles. Depuis la fin de l’Accord multifibres au début de 2005, cependant, la Chine a très fortement augmenté ses exportations textiles vers les États-Unis et l’Europe. L’analyse des données ComTrade indique qu’entre 2005 et 2009, les exportations chinoises vers les États-Unis ont augmenté de 457 %, passant de 2.1 milliards USD à 11.9 milliards USD. Dans le même temps, les pays africains qui tentaient d’accéder au marché américain ont vu leur part de marché diminuer, passant de 2.6 % à 1.3 %. Le textile est l’un des secteurs dans lesquels l’effet indirect de la concurrence chinoise a nui au développement des exportations africaines. Il est urgent que les Africains changent leur fusil d’épaule en vue de contrer cette menace. Ils en ont la capacité. Il suffit que la volonté politique suive le choix des industriels et des consommateurs.


 

Production de chaussures pour le marché éthiopien

Les petits pays compétents peuvent parfois sortir gagnants. Comme beaucoup de nations africaines, l’Éthiopie a été inondée par les importations chinoises au début des années 2000 (Gebre-Egziabher, 2007 ; Sonabe et autres, 2009). Contrairement à ses voisins, toutefois, l’Éthiopie a repris le contrôle de son marché intérieur et s’est affirmée comme un exportateur crédible de chaussures en cuir vers l’Europe et l’Amérique du Nord. Elle jouit d’un secteur de la maroquinerie bien développé, capable de s’approvisionner auprès d’un cheptel de bétail important (Bini, 2004). Au début des années 2000, ce secteur avait déjà commencé sa revalorisation. La croissance de l’industrie de la chaussure qui a suivi a été tirée par celle des fabricants existants et l’arrivée de nouveaux acteurs (Sonabe et autres, 2009). Beaucoup de ces derniers étaient des producteurs de deuxième génération qui connaissaient l’industrie et étaient plus éduqués que leur parents. Ils étaient ouverts aux idées nouvelles en matière de design, de méthodes de production, de gestion du personnel, de marketing, et d’approvisionnement, ce qui leur a permis de lutter contre la concurrence des importations et des micro-entreprises. L’industrie de la chaussure émergente à Addis-Abeba semble avoir bénéficié de la disponibilité de la matière première, de l’expérience et des compétences des entrepreneurs dans ce domaine et de leur volonté d’innover, notamment pour améliorer la qualité (cf. également Onudi, 2009).