Article publié le 2011-07-22 par Interview réalisé par Adama Bakayoko Culture
Daouda, Le Sentimental - « Je suis le chroniqueur de l’amour » [05/2011]
Détail d'un disque de Daouda de 1978

Il ya des artistes qui ne meurent jamais tant leurs chansons égrènent la nostalgie d’une certaine époque ! Daouda Le sentimental avec des chansons comme « Gbaka d’Abidjan », « bouquet de fleur » ou « mon coeur balance » force au souvenir de la fameuse époque du miracle ivoirien, au bon vieux temps du « vieux », surnom affectif du président Félix Houphouët Boigny, où il n’y avait ni « ivoirité », ni rébellion, ni pillage, ni milices. C’était la belle époque des « collégiennes d’Abidjan » si jolies dans leur costume bleu et blanc. A 60 ans et loin d’avoir dit son dernier mot, Daouda le sentimental avec un répertoire de plus en plus unique, se comporte comme ce « vieux » vin qui se bonifie avec l’âge. Toujours dans l’air du temps avec de nouvelles histoires, de nouveaux dilemmes et avec une voix qui est loin d’avoir porté les rides du temps, Daouda Le Sentimental se repositionne sur la scène musicale mondiale comme l’éternel chroniqueur de l’amour, toujours à l’affut de croustillants faits divers. Le Nouvel Afrique l’a rencontré à Lomé. Entretien avec Daouda Le Sentimental.

LNA : Bonjour Monsieur Daouda Tou Koné alias Daouda Le sentimental. Pouvez-vous, vous présenter aux lecteurs de « Le nouvel Afrique »? On peut se tutoyer?

Le sentimental : Mon nom à l'état civil est Daouda Tou-Koné alias Daouda le Sentimental comme nom d'artiste. Je suis un jeune homme de 60 ans, artiste-musicien, auteur-compositeur et chanteur, résidant à Yopougon-Siporex le quartier le plus "doux" d'Abidjan. Avec moi le tutoiement est un facteur de rapprochement.

LNA : Quel reste t-il aujourd’hui du technicien que tu es a la base?

En effet j'étais d'abord technicien à la RTI (Radio Télévision Ivoirienne) et c'est par un concours de circonstances que des collègues de boulot ont découvert mes petits talents de chanteur et m'ont poussé devant les projecteurs. Au début je chantais juste pour le plaisir en tant qu'amateur mais la demande du public grandissant chaque jour, mon directeur de programme de l'époque a décidé de produire mon tout premier disque en 1976. Le succès fut tel que je me suis retrouvé du jour au lendemain petite star malgré moi. La musique ayant fini par prendre le dessus sur la technique, j'ai dû faire un choix et je me suis engagé entièrement dans la carrière artistique en 1981

LNA : Tu chantes l'amour, pourquoi? Parce que tu "aimes les femmes" au sens de courir les femmes? Avec ton eternel hymne a l'amour est-ce qu’une femme t’a une fois dit non?. En d'autres termes, comme on le dit en Côte-D’ivoire "est-ce qu’une femme a une fois cassé ton coup"?

[Il se met a fredonner l’une de ses chansons favorites : « Je suis un sentimental » ] "…Dites-moi mes chers amis, Qu'est-ce qu'il y a de plus joli, De plus joli que l'amour, Dans la vie de tous les jours. Moi je chante la beauté, C'est mon sujet préféré, Voyez-vous c'est bien normal Je suis un sentimental…". C'est vrai que je chante beaucoup l'amour mais je ne suis pas pour autant un coureur de jupons ou un don juan. Je suis tous juste un conteur d'histoires mais surtout des histoires sentimentales qui ne sont forcément pas des faits vécus par moi-même. J'écoute beaucoup, j'observe la vie autour de moi et je m'inspire tout simplement de la vie ordinaire des gens ordinaires. C'est tout. Dans ma vraie vie amoureuse de tous les jours, je suis comme tout le monde avec des moments de bonheur et des moments de chagrin. Seulement dans mes chansons je suis toujours romantique, mais jamais mélancolique, car chez moi la bonne humeur est toujours de rigueur.

LNA : On a l'impression que tu as plutôt une vie sentimentale sans histoire? Daouda est ce qu'il t'arrive de faire des histoires avec celles que tu aimes? As-tu déjà connu le divorce?

Le sentimental : Moi je gère ma vie privée d'une façon discrète et je tiens à ce que mon activité publique n'empiète pas sur ma vie familiale. La famille c'est très important pour moi et c'est mon havre de paix en dehors de la vie tumultueuse du milieu artistique, c'est mon jardin secret.

LNA : As tu déjà vécu une histoire de "femme de patron", un scénario de "matchnul", une scène "d'accouchement simultané" de ta femme et de ta maitresse dans la même chambre d'hôpital?

Le sentimental : Comme je l'ai déjà dit, il y a très peu de mes chansons qui sont directement inspirées de ma propre vie sinon avec tout ce que je raconte ma vie serait vraiment rocambolesque. Les seules chansons qui sont des histoires vécues sont les suivantes: "Bouquet de fleurs", " Ma doudou de Wedala", "Les gbakas d'Abidjan", c'est tout. Le reste est tout simplement inspiré des faits de société, un peu comme les faits divers dans les journaux.

LNA : Pour beaucoup de mélomanes, tu pourrais être un consultant efficace pour les problèmes sentimentaux. Qu'en penses-tu?

Le sentimental : Je ne prétends pas tout connaitre des problèmes de sentiments mais j'essaye seulement de faire preuve de bon sens et de sagesse en abordant les thèmes que je traite dans mes chansons pour que les mélomanes puissent en tirer une certaine moralité comme dans les fables de la Fontaine ou dans les contes de chez nous. Je suis comme un chroniqueur de l'amour et je crois que c'est pourquoi toutes les générations se retrouvent dans mes textes car les histoires d'amour sont presque toujours les mêmes depuis l'éternité. Le monde change mais l'amour a toujours le même effet sur les hommes et les femmes

LNA : Daouda un jour dans le CRIKATA CRIKATA BANG BANG? Par référence à la vague de « coupé décalé »?

Le sentimental : J'en ait fait une petite expérience avec David Tayorault mais ça n'a rien à voir avec ce qui se fait couramment par la jeune génération. C'est tout juste un clin d'oeil pour dire qu'il n'y a pas de barrière entre les générations d’artistes. Si je suis sollicité, je tenterai encore l'expérience avec plaisir.

LNA : La côte d'ivoire ton pays vient de vivre des années épouvantables, certainement parce que l'amour a failli quelque part. Quelle réflexion?

Le sentimental : La Cote d'Ivoire est indéniablement un pays d'amour et c'est pourquoi toute personne qui visite ce pays en tombe amoureux. Malheureusement pendant un certain temps la haine s'est infiltrée comme un ver dans le fruit et a failli détruire l'harmonie qui a toujours regné dans ce pays où la culture est un mélange de toutes les cultures du monde. Mais Dieu merci on est revenu à de meilleurs sentiments et je suis très optimiste sur le retour définitif de la paix dans notre chère Côte d'Ivoire que nous aimons tant, un grand pays de fraternité.

LNA : Daouda un jour homme politique? Parlementaire? Maire?

Le sentimental : Oh non pas du tout, je ne suis pas fait pour ça. Je suis trop sentimental pour être politicien... Peut-être un poste de conseiller pour apporter un peu de bon sens dans ce milieu plein de démagogie et de bla-bla.

LNA : Daouda, entre "Fanta, Amina, Célestine, Maimouna, Lola..." pourrais tu nous dire laquelle a été ton plus grand amour? On n’a pas le sentiment que tu n'as pas vécu ces histoires.

Le sentimental: Seulement Célestine qui a été mon tout premier amour, le reste n'est que de la fiction

LNA : La "doudou de wedala" correspond t-il a une personne physique?

Le sentimental : Oui mais je ne t'en dirai pas plus (rires)

LNA : Quel message d’amour pour les fans de la Belgique ?

Je n'ai pas souvent eu l'occasion d’aller en Belgique mais je sais que j'ai beaucoup d’admirateurs et d’admiratrices là-bas et j'espère avoir bientôt l'opportunité de les rencontrer et le chanter pour eux. En attendant je leur envoie mes amitiés et « mon bouquet de fleur » accompagnés d'un nouvel album qui sera bientôt disponible à Bruxelles. Comme on dit au pays, "on est ensemble"!