Article publié le 2011-05-22 par Par Jamil Thiam Diaspora
Rencontre avec Assoumi Yayé - vice-président de l’association des nigériens de Belgique, au lendemain de la présidentielle au Niger - « cette élection transparente est une victoire de la démocratie sur la dictature » [04/2011]
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Au lendemain de l’élection présidentielle historique au Niger, un espoir pour des jours meilleurs est né chez le peuple nigérien. La communauté nigérienne de Bruxelles, à travers Assoumi Yayé, vice président de l’association des nigériens résidant en Belgique, a salué la transition démocratique qui s’est opérée dans le pays. Mais, à en croire ce dernier, outre la consolidation de la démocratie et de la justice, le nouveau président élu, Mahamadou Issoufou devrait s’atteler aux véritables préoccupations du peuple qui tournent autour de la lutte contre la pauvreté, de l’accès à l’éducation, à la santé et en général aux conditions de vie meilleure.

Présentation

Je m’appelle Assoumi Yayé. Je suis nigérien résidant à Namur. Au Niger, j’ai occupé plusieurs fonctions. Comme j’ai l’habitude de dire, j’ai roulé ma bosse partout. J’ai été instituteur pendant 12 ans à Dosso, à Gaya. En 1997, je suis revenu à Dosso comme formateur de formateur à l’école normale où j’avais en charge la matière pédagogique des mathématiques et des activités de veille. Ici, je participe aux activités de l’association des nigériens résidant en Belgique dont je suis le vice-président. A travers cette structure, nous tenons régulièrement des réunions afin de sensibiliser nos compatriotes. Et tout récemment, nous avons organisé une grande fête culturelle, un moment de retrouvailles parce que c’était la première occasion pour la base de prendre contact avec le nouveau bureau de l’association. Donc, il y a eu la présentation du bureau suivi d’une soirée culturelle rehaussée par la présence de grands artistes. Par ailleurs, je milite au sein de la formation politique de l’ex premier ministre Hama Amadou. En préparation de la campagne électorale, nous avions ouvert une caisse à travers laquelle nous avons pu acheter et envoyer au pays deux véhicules de type 4 x 4 pour le parti mouvement démocratique nigérien (Moden).

Préparation de la présidentielle en Belgique

Ce que nous avons fait ici. A un moment donné, on pensait qu’on allait voter. Mais, cela n’a pas été possible parce qu’à la dernière minute, on nous a dit que la diaspora ne vote pas. On s’est dit alors comme on n’a pas les moyens de voter qu’on allait demander à nos familles au pays de voter pour nos candidats. A un moment donné, il y a eu un déclic, certains se sont dit que si on demandait aux gens de voter, ils allaient le mettre à l’actif des coordinations régionales qui sont considérées sur un pied d’égalité avec la diaspora. Mais après on s’est dit que l’essentiel, c’est de permettre au parti d’engranger des voix. Ainsi, on a appelé nos proches, nos parents et amis pour leur demander de voter massivement pour nos candidats respectifs.

Lecture sur la transition démocratique dans le pays

Jusqu’à la date d’aujourd’hui, nous n’avons pas eu écho de fraudes massives contrairement à ce qui se passe généralement dans les pays du tiers monde. Je crois que les observatoires, africain et international ont bien apprécié l’élection nigérienne. La preuve, le candidat malheureux Seïni Oumarou a accepté le résultat des urnes et n’entend pas faire recours et s’est rendu au domicile de Mahamadou Issoufou pour le féliciter. C’est une première en matière de démocratie.

Ce que je retiens principalement au delà de cette élection, c’est la victoire de la démocratie sur la dictature. Ce que voulait faire l’ex président Tandja n’était pas possible. On a connu Mussolini, Hitler, Idi Amine Dada. Cependant, lorsqu’un président de la république du point de vue constitutionnel s’autoproclame et prolonge pour trois ans son mandat venu à terme, c’est du jamais vu. Cela a poussé l‘armée à faire irruption dans l’arène politique. Mais, nous nigériens, c’était le moindre mal avec ce coup d’Etat pour ramener le processus démocratique.

Lecture au plan économique

Le Niger n’échappe pas à la règle en vigueur dans les pays d’Afrique subsahariens où tout est urgence. Il y a une famine qui est là, indéniable. Le taux de scolarisation est bas, la couverture sanitaire est loin des indications du Pnud. Un autre élément d’inquiétude, c’est que le Niger est un des grands pays producteurs d’uranium. Avec ce que vit le Japon, toutes les grandes nations reviennent sur l’énergie nucléaire. Il faut s’attendre à une baisse du coût de l’uranium. Donc, à court terme, il peut y avoir des incidents sur le Pib du Niger. Quelles attentes après l’élection démocratique Ce qu’on attend du nouveau président élu, c’est qu’il s’attèle aux préoccupations du peuple nigérien. Parce que comme partout dans le tiers monde, tout est urgence : l’école, la santé, l’environnement, la lutte contre la pauvreté, la justice et surtout la démocratie. Qu’il assure les bases d’un vrai jeu démocratique pour que l’armée ne fasse plus irruption sur la scène politique. Le général Salou Djibo a dit que ce n’est pas de gaité de coeur que l’armée se mêle de la politique. Toutefois, si entre acteurs politiques, le jeu n’est pas franc, il faut bien qu’une force intervienne.

Nous attendons aussi de lui, qu’il se mette au dessus de la mêlée, qu’il sache aujourd’hui, pour ceux qui l’ont élu et pour ses opposants, qu’il est le président de l’ensemble de la communauté nigérienne. Nous fondons beaucoup d’espoir sur son mandat. Ce qui s’est passé au cours de cette élection présidentielle au Niger est extraordinaire. Du jamais vu. En effet, les deux grandes régions ont voté chacune pour un candidat différent. Si l’est a voté pour le candidat de l’ouest, l’ouest a fait de même pour le candidat de l’est. C’est une victoire de la démocratie que le président Issoufou a tout intérêt de consolider.

Quel message à la diaspora

C’est de s’investir et d’apporter aussi modeste soit-elle une pierre à la construction nationale. On n’a pas besoin d’être acteur politique, ni opérateur économique de renom pour participer à l’édification nationale. Chaque nigérien qu’il soit de l’intérieur ou de l’extérieur doit apporter sa contribution en vue d’un Niger uni, d’un Niger de paix et de prospérité.