Article publié le 2012-02-29 par Par Daouda Emile Ouedraogo Editorial
Mettre fin à la faim [01/2012]
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Une année s’achève, une nouvelle entame son crédo. 2011 emporte avec elle ses soupirs, ses désirs inassouvis, ses promesses non tenues. 2012 se présente avec ses incertitudes, ses craintes, ses souhaits. En Afrique, le flot des vagues des révolutions arabes dessine une nouvelle carte géopolitique pleine d’incertitudes, de craintes, de peurs face à l’arrivée d’hommes «neufs» au pouvoir. La campagne agricole «calamiteuse » dans la sous-région ouest-africaine fait craindre et planer le spectre de la faim. 2012 effraie. La nouvelle année s’installe avec les impératifs du quotidien : se nourrir , se vêtir, se soigner, se loger. Chaque individu est confronté à la résolution de cette équation à quatre inconnues. Le monde, plus que jamais, s’émeut d’entamer une année aussi incertaine qu’impromptue. La peur du lendemain semble refroidir les méninges. On est bloqué dans les réflexions tant la crise financière paralyse les ambitions des grandes nations. En Afrique, la grande incertitude semble se confondre avec ces économies qui ne savent pas à quel saint se vouer ou à quel «plan de sauvetage» s’accrocher. Les tumultes, les tourbillons des «mesures de rigueur» soulèvent une telle poussière que l’Afrique, retranchée dans son coin, semble se dire «qu’adviendra- t-il de moi en 2012 ?» Dans le berceau de l’humanité, 2012 s’annonce comme une année charnière. La saison agricole qui vient de s’écouler à laissé sur le carreau de nombreux ménages. En Afrique de l’Ouest particulièrement, la grande équation à résoudre est celle de la faim. De sources officielles, 1,4 million de personnes sont en insécurité alimentaire. Pendant ce temps, environ 44 millions de personnes risquent de subir les foudres de la famine. C’est une réalité. Cette réalité appelle des mesures d’urgence. Elle appelle des prises de décisions politiques et économiques pour transformer les défaites, les échecs, en victoires, en réussites. Les crises alimentaires, économiques que connaîtra le continent cette année ne sont pas nouvelles. Il ne faut donc pas s’alarmer, ni jeter le bébé avec l’eau du bain. Les nations les plus fortes se sont bâties au prix des sacrifices. L’Afrique traversera 2012 avec abnégation et don de soi. Pour cela, il faut surtout sortir de nos peurs, de nos angoisses pour affronter les lendemains incertains avec la certitude que ce que l’imagination de l’homme peut concevoir, il est capable de le réaliser. Une année vient de succéder à une autre. Une nouvelle page s’ouvre pour les uns. C’est la continuité pour les autres. En Afrique, comme partout ailleurs, on met les bouchées doubles pour débuter cette nouvelle année avec entrain et surtout, ‘partir du bon pied’, pour emprunter le langage des athlètes. Toute nouveauté est pleine d’incertitudes. 2012 l’est aussi pour les Africains. L’inconnu a toujours été une obsession. 2012 consacrera une option fondamentale pour les 54 pays du continent : celle de juguler la crise alimentaire. Il y a deux ans, de nombreux dirigeants ont proposé de faire de leur patrie une nation émergente. Certains ont donné des délais de 15 ans, d’autres 50 ans, etc. 2011 a été l’année du lancement de l’émergence de l’Afrique. Dès son entame, ce processus de développement semble prendre l’eau de toutes parts avec les multiples crises. Cette donne ne doit pas faire fléchir la marche vers le progrès. Elle ne doit pas faire faiblir les assauts des bras valides contre les aléas des temps modernes. Chaque individu doit se sentir concerné par le développement du monde en général, et celui de l’Afrique en particulier. Si le monde est devenu un village planétaire, alors, tous les hommes sont des frères et soeurs d’un même village. L’une des certitudes de notre existence est le fait que l’homme ne prend conscience de son vécu que lorsqu’il est capable de franchir des obstacles, lorsqu’il se bat pour donner un souffle à une vie. L’Afrique se battra durant cette année pour vaincre la faim. C’est son premier défi. L’Afrique est donc bien partie. Mais le pari n’est pas totalement gagné. L’un des sages d’Afrique, en l’occurrence le Pr Joseph Ki Zerbo, le premier africain agrégé d’histoire, militant du développement endogène, disait qu’on ne se développe pas, mais on développe, en ce sens que le développement, c’est dans la tête. Il le définissait ainsi : «le développement, c’est le passage de soi à soi-même à un niveau supérieur ». Cette affirmation sous-entend que le développement de l’Afrique passera forcément et indéniablement par un changement de mentalités. Il faut transformer les esprits et ouvrir nos espérances aux ambitions nobles et durables d’une existence pétrie et forgée vers le futur. Ce futur se forge par un assemblage de caractères et de pratiques qui répondent à la vision d’un monde nouveau. Il ne peut y avoir d’assemblage de caractères sans une vision commune des Africains. C’est ensemble que les pays africains atteindront l’émergence tant souhaitée. Pour l’historien Joseph Ki Zerbo, le développement se résume à une vision : «D’après ce que les historiens savent», disait-il, «aucun peuple ne s’est développé uniquement à partir de l’extérieur. Si on se développe, c’est en tirant de soi-même les éléments de son propre développement. En réalité, tout le monde s’est développé de façon endogène. Personne ne s’est installé sur la place publique en tendant sa sébile dans la main en attendant d’être développé. (…) Donc, c’est en étant profondément enraciné qu’on est prêt à toutes les ouvertures.» C’est en s’ouvrant, sans vilipender nos racines, que l’Afrique se développera. 2012 promet.